On l’a beaucoup vu passer cette bande dessinée, sur les blogs. Voilà que je la découvre à mon tour.
Marguerite ne sait pas encore qu’elle est atteinte du syndrome d’Asperger. On la découvre dans différents environnements : à son travail, chez elle, avec son copain, dans ses différentes relations sociales. Mais son malaise saute aux yeux. Le bruit, les conversations, le contact physique avec autrui, les échanges, on découvre que tous ces éléments la perturbent énormément. Que ce n’est presque pas viable pour elle. Elle est peut-être simplement timide, ou même introvertie, imagine-t-on. Car Marguerite ignore, jusqu’à une certaine rencontre, qu’une pathologie, un nom, se cache derrière toutes ces émotions dérangeantes. Le quotidien devient de plus en plus insoutenable. C’est sans compter la pression de son entourage à adopter une comportement normal, de faire les choses que tout le monde fait. Mais voilà donc, après avoir passé des examens dans un institut spécialisé, Marguerite apprend qu’elle est atteinte du syndrome d’Asperger. Ce jour est une véritable délivrance. Enfin, elle a la preuve que son état est NOR-MAL, que d’autres personnes ressentent les mêmes choses qu’elle, et surtout, qu’il existe des solutions et des professionnels pour l’aider à vivre le plus sereinement possible avec cette particularité.
Cette bande dessinée, c’est l’histoire d’une reconversion. Alors que Marguerite nous apparaît comme une fille renfermée, peu communicative, mélancolique, des ailes semblent lui pousser une fois que les résultats de son bilan sont tombés. A partir de ce jour, elle découvrira une tonne d’informations sur sa spécificité, fera des rencontres déterminantes, et adoptera les mesures adéquates pour vivre comme tout le monde et se sentir bien dans sa peau. Cela passe également par un gros tri dans son entourage, qui se montre bourré de préjugés et complètement hermétique à cette différence, tellement elle est « invisible » finalement.
Bien que j’aie eu un peu de mal avec le style graphique de cet album, j’ai trouvé néanmoins qu’il faisait bien passer les émotions de Marguerite, et spécifiquement, toute cette pollution sociale qui l’entoure et la touche au plus haut point. Nous-mêmes, ne pouvons nous rendre compte à quel point les échanges humains sont handicapants pour une partie de la société. Il m’a donc fallu un petit moment d’adaptation par rapport au dessins, qui se limite au noir, blanc et rouge. J’ai par contre été davantage séduite par la narration. Il y a peu de dialogues, le lecteur est invité à se concentrer sur ces dessins qui sont déjà lourds de sens, sans apport textuel supplémentaire. Julie Dachez a opté pour une narration extérieure, pour expliquer le quotidien de Marguerite. En réalité, cette jeune femme explique sa propre histoire, et les étapes qui l’ont menée à la publication de ce livre.
Cette bande dessinée est vraiment un beau projet car elle informe beaucoup, et sensibilise les lecteurs à l’autisme et à la cause des personnes qui, de façon générale, ne rentrent pas dans le moule traditionnel de la société. C’est fort bien renseigné et très intéressant, même pour les personnes qui n’ont pas une sensibilité particulière pour le sujet. On apprend notamment que peu de personnes font les tests d’Asperger, surtout les femmes, qui se font davantage violence en « faisant semblant » d’avoir un comportement normal avec les autres.
Il offre aussi un message d’espoir et de courage. Les pages à la moitié de l’album sont d’ailleurs beaucoup plus lumineuses. Cette particularité donne des ailes à Marguerite et l’orientera vers des choix qui lui correspondent et parmi lesquels elle s’épanouira beaucoup plus qu’avant (le lancement d’un blog, la publication de cette BD, mais aussi la reprise d’études en psychologie sociale).
J’ai pris du plaisir à tourner ces pages, qui nous apprend beaucoup de choses sur le sujet. Une bibliographie à la fin de l’ouvrage permet d’approfondir ses connaissances. Après cette lecture, je suis allée sur le blog de Julie Dachez, et ai visionné quelques-unes de ses vidéos où elle parle également de féminisme, de la question du genre, … de façon légère et très agréable à écouter.
Une belle découverte!
Julie Dachez (texte) et Mademoiselle Caroline (dessins), La différence invisible, Editions Delcourt/Mirages, 2016, 196 pages
Le rendez-vous des fans de BD cette semaine, c’est une nouvelle fois chez Moka 🙂