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« Le journal malgré lui de Henry K. Larsen » de Susin Nielsen

Vous le savez, quand on me dit qu’il faut que je découvre un-e auteur-e jeunesse, tous mes sens sont en alerte! C’est ainsi que par hasard, grâce à une photo publiée sur son instagram, Marie-Claude m’a glissé le nom de Susin Nielsen, qui est ni plus ni moins son auteure jeunesse préférée. Évidement, je lui ai fait confiance les yeux fermés!

Henry Larsen a connu il y a peu une grosse tragédie qui l’a touché, lui et sa famille. Une épreuve qui les ont poussés à quitter Port Salish pour Vancouver et à recommencer une nouvelle vie. Depuis ce douloureux événement, Henry voit Cecil, son psychologue, toutes les semaines. C’est lui-même qui lui a offert ce journal et lui a conseillé d’écrire ses pensées, le déroulement de ses journées, sa vie au collège, ses rêves, … tout ce qu’il n’arrive pas à exprimer oralement et qui doit sortir. Dans le nouvel appartement qu’il partage seul avec son papa, Henry va devoir trouver ses marques, mais aussi s’ouvrir aux nouvelles rencontres qui se mettent, tout naturellement sur son chemin. Dans leur immeuble, ils y croisent Karen Vargas, cette femme au maquillage bien trop vulgaire, M. Atapattu, leur sympathique voisin sri lankais qui passe ses journées soit devant les émissions de télé achat, soit à cuisiner du curry. Dans son nouveau bahut, Henry fera également des connaissances, notamment via le club de « Que le meilleur gagne » comme Farley ou Alberta.

Quel merveilleux roman jeunesse! Il réunit tous les ingrédients que je recherche et que j’apprécie dans le genre. Derrière la légèreté du quotidien de cet ado, se cache une terrible vérité, un événement qui continue de le hanter et qu’il doit apprendre à maîtriser. L’occasion donc pour l’auteure d’aborder des sujets comme la reconstruction, le deuil, mais aussi l’entraide et l’amitié.

Susin Nielsen livre un roman frais, à l’humour diablement efficace, un style fluide qui colle si bien à ce personnage Henry. Et puis ce petit héros est terriblement attachant. Il se livre à cœur ouvert et instantanément, laisse parler ses émotions qu’il n’arrive pas à exprimer autrement. Cela donne des pages parfois très fortes émotionnellement. J’avoue en avoir lu certaines vraiment à fleur de peau, chose qui ne m’arrive que très rarement.

Et puis la force de ce roman, c’est aussi cette panoplie de personnages qui gravitent autour de Henry et de son papa. Ils sont bourrés de qualités, totalement atypiques, généreux, aidants, et fidèles. Un hymne aux vraies belles rencontres qui vous remettent du baume au coeur et apparaissent comme essentielles à un moment de votre vie.

C’est un beau coup de coeur pour ce roman. Je l’ai parcouru avec le sourire et parfois le cœur serré. Avec l’envie d’encourager Henry et de l’aider à avancer. Un roman qui donne foi en l’humain et en l’amitié, tout en abordant un sujet d’actualité grave.

Ce titre a reçu le Governor General’s Literary Award, prestigieux prix canadien, et je le comprends aisément.

Susin Nielsen, « Le journal malgré lui de Henry K. Larsen », traduit de l’anglais (Canada) par Valérie le Plouhinec, Éditions Hélium, 2013 (édition originale : 2012), 239 pages

« Les petites victoires » d’Yvon Roy

Merci, merci, merci Yvon Roy! Grâce à cette petite pépite, vous m’avez sortie d’un état proche de la déprime qui me touchait pratiquement depuis l’éprouvante lecture du dernier Joyce Maynard (on en reparle plus tard). Mais comment ai-je fait pour passer autant de temps sans lire une BD en plus! Allez hop, me revoilà en selle pour le rendez-vous du mercredi!

Marc et Chloé filent le parfait amour depuis quelques temps. Tout semble en équilibre dans leur vie, alors ils se lancent dans le projet d’agrandir leur famille. Olivier naît peu après, pour leur plus grand bonheur! Surtout celui de Marc, qui, inconsciemment, se projette énormément à travers son fils. Mais alors que leur bébé fête ses 18 mois, les jeunes parents se rendent compte que quelque chose cloche. Leur petit n’évolue pas comme la « normale », il ne parle pas du tout, semble « ailleurs ». Après des examens, la réponse à leurs questionnements tombe : Olivier est autiste.

A partir de ce jour, Marc et Chloé vont devoir apprendre à revoir tout le système d’éducation qu’ils avaient imaginé pour leur enfant. C’est leur quotidien qui est chamboulé avec cette nouvelle. D’ailleurs, leur couple ne résistera malheureusement pas à cette épreuve. Néanmoins, ils feront tous deux preuve d’une incroyable complicité et tenteront de rester unis quoi qu’il arrive, pour le bien-être du petit Olivier.

« Les petites victoires », c’est avant tout un grand message d’amour d’un père envers son garçon. Après avoir fait le « deuil » de la famille qu’il s’était imaginé, Marc accompagnera Olivier dans chacune des grandes étapes de son évolution et de sa vie, en laissant de côté sa vie personnelle et professionnelle. Ce qui est incroyable dans ce témoignage, c’est le courage de ce papa qui se sent parfois pris au dépourvu, mais qui ne baisse jamais les bras. Il croit en les capacités de son fils et veut lui donner toutes les cartes en main pour lui permettre de progresser. Et surtout, il suit son instinct de papa, en faisant fi des recommandations des professionnels. Les progrès d’Olivier sont spectaculaires et leur relation est d’autant plus soudée et complice.

C’est une histoire très touchante. Yvon Roy parle évidement de son cas personnel, mais à choisi de mettre de la distance entre les personnages et son propre vécu, en les nommant autrement, par exemple. Véritable leçon de vie et de persévérance, l’auteur démontre avant tout que rien ne vaut les intuitions d’un papa et d’une maman.

De plus, il a réussi un équilibre parfait selon moi entre un style graphique assez simple mais proche de la réalité, avec un trait fin, et un texte sans fioritures, qui raconte justement et tout en retenue les émotions qui viennent droit du cœur.

Le lien avec l’album de Fabien Toulmé qui a aussi fait part de son expérience avec sa petite fille trisomique dans « Ce n’est pas toi que j’attendais » est évident dès les premières pages, mais j’avoue avoir préféré la retenue et la sensibilité de ces « petites victoires ».

Yvon Roy offre finalement un message universel, sur la plus belle des relations, celle entre un parent et son enfant. Surtout, il met le doigt sur l’importance de les soutenir en dehors des chemins balisés. Enfin, il aborde tout en finesse la différence d’un enfant autiste, parfois de façon imagée. Une très belle lecture avec beaucoup de moments riches en émotions et qui donne la « gnak ».

Yvon Roy, « Les petites victoires », Éditions Rue de Sèvres, 2017, 150 pages

 

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Je fais ma rentrée au rendez-vous de la BD, cette semaine chez Stephie