Je me suis laissée tenter par ce roman après avoir vu passer de très nombreux avis, bien souvent élogieux. Valérie Tong Cuong, je l’ai découverte avec L’atelier des miracles, un titre qui m’avait plu sans plus.
C’est le sujet que l’auteure a voulu mettre en lumière qui m’a surtout donné envie : elle a choisi de parler de l’occupation allemande tout au long de la Seconde Guerre Mondiale dans la ville du Havre et des épisodes qu’ont été contraints de traverser les havrais. Dès les premiers exodes en 1940 jusqu’à la signature de l’armistice en 45, on découvre à travers la voix de 5-6 personnages tout ce qui s’est passé dans cette petite ville portuaire française. Les habitants ont non seulement du se mettre à la botte des allemands, leur laisser tout ce qui appartenait à leur vie d’avant, et obéir à leurs moindres désirs, et en même temps, assister impuissants aux bombardements sanguinolents de la part de l’armée britannique.
Deux familles se partagent ce roman choral : celle de Muguette et d’Elénie, deux sœurs à la personnalité fort différente mais dont l’amour véritable et la bienveillance ne cessent de les unir tout au long des événements. Leurs maris ont été appelés au front très rapidement. Pour leurs enfants respectifs, elles combattront la misère, la violence et la peur désormais omniprésente dans leur ville avec force, courage et persévérance.
Notre famille sombrait dans la défaite et j’étais impuissante. C’était une chose de lutter contre un ennemi, contre les circonstances, c’en était une autre de s’adapter au vide. (p.87)
Difficile de quitter ce roman, grâce notamment au grand talent de conteuse que j’ai (re)découvert chez Valérie Tong Cuong. A travers ses personnages touchants qui racontent chacun à leur tour ce qu’ils observent tout autour d’eux, on vit les événements. Elle arrive à attraper son lecteur et à l’emmener dans cette atmosphère triste, malgré le soleil régulièrement présent. Comme les héros, on ressent l’empressement d’agir vite pour sauver sa famille, l’empressement des choix qui transpercent le cœur. Les émotions sont vives, délivrées sans filtre. On passe par la tristesse, la joie, l’amour, la haine, le dégoût, l’espoir.
J’ai également le sentiment d’avoir réellement appris des choses sur cette Grande Guerre, et notamment le fait que les havrais devaient envoyer leurs enfants en Algérie pour les sauver mais surtout leur offrir un avenir meilleur.
Par amour pour une mère, par amour pour une soeur, par amour pour un enfant, par amour pour un mari, par amour pour un enfant recueilli, comment des personnes ordinaires arrivent à poser des choix qui vont au-delà de leur intérêt personnel. C’est l’amour pour l’autre qui prime, toujours.
Un roman qui vaut le détour, ne fut-ce que pour se rappeler par quoi sont passés tous ces innocents qui ont subi de plein fouet l’avidité de pouvoir de quelques personnes isolées. A lire également pour se plonger dans une histoire hautement romanesque, à ne plus pouvoir relever la tête. Et aussi pour toutes ces émotions qui vous submergent du début à la fin. Il m’a manqué la petite étincelle pour que cela soit le coup de cœur partagé par bon nombre d’entre vous, mais cela restera un très beau souvenir de lecture de mon été.
Valérie Tong Cuong, « Par amour », Éditions JC Lattès, 2017, 413 pages