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« Hugo de la nuit » de Bertrand Santini

Hélène et Romain vivent avec leur fils unique Hugo, âgé de 12 ans, au domaine de Monliard. Une somptueuse bâtisse perchée en haut d’un cimetière, qui fait bon nombre d’envieux. Et pour cause, une source de pétrole vient d’être observée, traversant leur domaine. Qui dit pétrole, dit argent et la famille devient de plus en plus victime d’actes de vandalisme. Ils savent que les villageois jaloux de leur situation et de leur maison sont nombreux. La seule lueur d’espoir qui anime encore Romain est cette découverte qu’il fait un soir d’été : le botaniste reconnaît la « Sipo Matadore« , une fleur très rare, ayant été exploitée il y a bien des années. Si cette présence se confirme, le domaine de Monliard sera classé en zone protégée et la famille pourra continuer à y vivre en toute tranquillité. Malheureusement, la nuit qui suit cette découverte fantastique tourne au drame, avec une affreuse agression touchant la petite famille.

Je ne peux en dire plus sur cette histoire, tant elle révèle des surprises et des mystères. Bertrand Santini, que je ne connaissais pas du tout, a écrit ce roman sous la forme d’un conte fantastique, à l’univers très original et aux multiples facettes. Plusieurs émotions surgissent à cette lecture, de la tristesse au début, beaucoup de sympathie pour tous les personnages haut en couleurs que l’auteur met en scène, de l’injustice également. On ne sait jamais vraiment ce qui est vrai, ce qui est faux. C’est extrêmement bien tourné! J’ai vraiment été absorbée par cette ambiance nocturne enveloppante et mystérieuse.

L’auteur joue aussi sur un humour particulier, noir, parfois dérangeant car il touche au sacré et à la mort. Certaines scènes sont néanmoins tordantes! La mise en scène est soignée, rendant l’histoire très visuelle. On arrive aisément, malgré la fantaisie, de s’immerger dans cet environnement si particulier.

C’est vraiment un roman qui me restera longtemps en mémoire, tellement il a joué avec mes émotions d’une part, et d’autre part, pour son originalité, son côté féérique, magique.

Pour appréhender certains romans, il faut être curieux et faire confiance aux lecteurs et lectrices qui nous ont précédés. C’est exactement ce qu’il se passe avec ce roman, et le résultat est très très plaisant! Et puis, je l’avoue, cette splendide couverture a joué aussi!

Bertrand Santini, « Hugo de la nuit », Éditions Grasset Jeunesse, 2016, 224 pages

« Le Ouistiti » de Myriam Mallié (texte) et Gianluigi Toccafondo (dessins)

A mes yeux, les contes, ils sont destinés aux enfants. Ils sont soufflés juste avant d’aller dormir, pour rêver, ou pour vivre pendant quelques minutes une aventure extraordinaire. Mais ce conte-ci, je ne le mettrais pas entre les mains d’un petit, croyez-moi! J’ai d’ailleurs moi-même frissonné à cette lecture!

Dans ce conte des frères Grimm, la princesse n’a rien de gentil. La beauté, elle semble l’avoir. Mais elle fait peur, elle ne se mêle pas aux gens et pique des crises d’humeur toute seule dans sa tour où elle s’est enfermée. Tout en hauteur, composée de 12 fenêtres, elle lui offre une vue complète et très détaillée de ce qui se passe dans le village. Et qu’est-ce qu’elle y fait dans cette tour? Elle regarde.

La tour lui avait paru soudain désirable. Un ailleurs possible, un lieu de protection, une chambre forte. Un atelier aussi, où étudier, écrire, peindre, dessiner. Un retour vers des lieux d’enfance, des sentiments et des souvenirs perdus. (p.11)

Elle espère l’amour aussi… Mais ses prétendants, elle les invite à se cacher. Si elle les trouve, elle les tue. Et comme elle a un œil partout, les malheureux sont souvent décapités. Jusqu’au jour où trois frères tentent de conquérir son cœur.

Il s’agit d’un conte que je ne connais pas et que j’ai découvert sous la plume de Myriam Mallié, grâce à Mina. Une plume différente, qui réinvente certains mots. Un style saccadé, par des retours à la ligne fréquents et des répétitions nombreuses.

Étonnante image de la méchante princesse qui tue les hommes qui n’arrivent pas à se cacher. On sent malgré tout un profond mal-être chez elle et l’espoir de voir sa vie prendre un autre tournant. Ce tournant, elle pense le connaître grâce à l’amour. Mais elle n’y croit pas, à l’amour.

Cette histoire de princesse perchée en haut de sa tour m’a fait voyager, m’a emmenée dans un lieu qui ne ressemble à aucun autre. L’ambiance générale sombre, un peu effrayante aussi, est accentuée par des illustrations tout aussi « bizarres », faites de collages et de mélange de genres.

J’ai été emportée par les mots de Myriam Mallié, ce sont des mots que j’aurais d’ailleurs aimé écouter. Car un conte, ça se raconte surtout. C’est vraiment la découverte d’une plume que je réalise avec ce court texte, et un « presque » retour en enfance! Un plaisir retrouvé également avec Esperluète, ce format très agréable et toujours cette qualité de papier et de présentation.

Seconde contribution cette année au mois belge d’Anne et Mina!

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Myriam Mallié (textes) et Gianluigi Toccafondo (illustrations), « Le Ouistiti », Éditions Esperluète, 2013, 62 pages